Pour une fois cet article ne parlera ni d’informatique, ni d’électronique. Pas de Raspberry Pi, pas de Pandaboard. Aucun Beagle Bone non plus que de micro-contrôleur. Je vais juste parler d’un loisir qui occupe mon – rare – temps libre depuis quelques mois : le pilotage VFR, et plus particulièrement de mon expérience du jour : le lâcher.
En arrivant à l’aéroclub ce matin, j’étais plutôt préoccupé par les masses nuageuses à l’horizon ouest, mais elles semblaient se dissiper lentement. Depuis le printemps, j’ai entrepris de réaliser un vieux rêve et de me lancer à la conquête de la Licence de Pilote Privé mais à plusieurs reprises j’ai dû rester au sol à cause d’un plafond nuageux trop bas.
Le ciel semblait plutôt clément cette fois, les nuages suffisamment hauts pour me permettre de voler. Lucien, mon instructeur, sortait l’avion, un Morane-Saulnier MS880B dit « Rallye » du hangar de l’aéro-club et me laissa faire méticuleusement la visite pré-vol.
Nous voilà partis pour trois tours de pistes. C’est alors que j’entamais la montée initiale du troisième tour qu’il m’annonça : Refais-moi le même atterrissage et je descends pour que tu fasses un vol solo.
Un peu angoissé quand même je bouclai mon troisième tour, m’annonçant cette fois à la radio pour « un complet » (atterrissage complet par opposition au « touché » où l’on re-décolle dans l’élan). Préoccupé, j’ai d’ailleurs oublié d’annoncer « piste dégagée » une fois sur le taxiway…
Devant le parking de l’aéroclub, Lucien descendit de l’avion, me laissant avec l’impression d’un grand vide sur le siège passager. Le jour était donc arrivé.
Roulage
Je m’annonçai à la radio « Nangis de Fox-Yankee-Tango, au parking Dassault, je roule pour la 23 » et poussai un peu les gaz pour commencer le roulage. L’aérodrome n’était pas très fréquenté, mais j’ai néanmoins eu l’impression que tous les piétons que je croisais se retournaient pour me regarder. Arrivé au point d’arrêt, je suivis scrupuleusement ma check-list avant alignement. Vérification des commandes, des magnétos, des paramètres moteur, etc.
Un message radio avant de pénétrer sur la piste : « Nangis de Fox-Yankee-Tango, au point d’arrêt 23, je m’aligne et je décolle » (notre aérodrome est en auto-contrôle). Alignement méticuleux sur l’axe.
C’était donc le grand moment, profonde respiration, puis « talons au plancher » (pour relâcher les freins et commander l’avion au palonnier) et « plein gaz ».
J’annonçai à voix haute « Le badin est actif, pas de voyant d’alarme, régime moteur correct, on poursuit ».
40 kt (environ 75 km/h) : soulager la roulette de nez en tirant légèrement sur le manche.
60 kt (environ 110 km/h) : rotation et début de montée. Petit palier pour laisser le moteur accélérer et reprise de la montée.
Une pensée me traverse l’esprit : maintenant que tu es en l’air, tu n’as plus le choix, il va falloir le faire atterrir.
Montée
Quelques secondes plus tard, j’annonçai à la radio : « Nangis de Fox-Yankee-Tango, en montée initiale, je me reporte en vent-arrière 23 ».
À 300 pieds du sol, je coupai la pompe à essence, en vérifiant que la pression se maintienne, puis entamai les vérifications « Vario positif, vitesse-air supérieure à 65 kt, paramètres moteurs corrects » avant de rentrer les volets et de dérouler à haute-voix ma check-list après décollage.
Virage à gauche en continuant la montée, cap au 140. Mise en palier, un coup d’oeil à l’altimètre : quoi ? 1400 pieds au lieu de 1200 ? Et oui, Lucien m’avait prévenu qu’avec un passager en moins on montait plus vite, mais je l’avais complètement oublié. Rectification de mon altitude et virage à gauche pour prendre un cap au 050.
J’arrivai à hauteur de la piste, et m’annonçai « Nangis, de Fox-Yankee-Tango, en vent-arrière 23 pour un complet ».
Préparation à la descente
- Pompe à essence : sur On,
- Vérification du réservoir d’essence : pas de changement à faire,
- Réchauffe carbu : sur On,
- Réduction du régime : 1700 rpm,
- Cabré pour éviter de descendre : la vitesse diminue,
- Badin dans l’arc blanc : sortir un cran de volets,
- Remontée du régime pour obtenir 70 kt,
- Réglage du compensateur.
Je déroulai la check-list avant descente et enchaînai sur un virage à gauche pour le cap 320 « sans monter, sans descendre en conservant 70 kt dans le virage » (dixit Lucien).
J’apercevais la piste, et me trouvant un peu trop haut, j’engageai tout de suite la descente et m’annonçai « Nangis, de Fox-Yankee-Tango, en base 23 pour un complet ».
J’arrivai déjà presque dans l’axe de la piste, dernier virage pour m’aligner et réduire le régime puis régler le compensateur.
Finale
Check-list avant atterrissage : « j’ai la pompe, j’ai la réchauffe, un cran de volets et 65 kt compensés »
À partir de maintenant ce n’est plus qu’une litanie : Axe – Plan (de descente) – Vitesse – Axe – Plan – Vitesse… Je voyais le seuil de piste se rapprocher et entendais dans ma tête la voix de Lucien « Le 23, vise-bien le 23 ».
Seuil de piste franchi, réduction complète et arrondi final. Puis le toucher des roues avec un petit écart vers la gauche en compensant un peu trop le léger vent de travers. J’entendis alors la voix de Lucien – bien réelle et à la radio cette fois – « Hé bien voilà, c’est fait ! ». Le soulagement et une vague de joie m’envahit alors.
Retour au hangar
Retour au parking – sans oublier de signaler « Piste 23 dégagée » cette fois – et le plaisir de remplir sur mon carnet de vol une case de la colonne « Commandant de bord » et non « Élève pilote ».
C’était ce matin, c’était mon « lâcher solo » et je ne suis pas près de l’oublier.
Bravo, on s’y croirait!
Ça donne tellement envie !
Merci pour ce récit.
Félicitations! 🙂
A quand la boite noire pour revivre vos exploits une fois au sol (ou débriefer avec l’instructeur)?
Sérieusement, Raspberry pi + Camera module (pour filmer les instruments) + Audio capture via USB (ex: http://www.rolandus.com/products/details/1155 ) + batterie et à priori cela devrait être suffisant. 🙂
Bravo en tout cas!
Félicitation
bravo pour le PPL.
n oublie pas qu autour de paris la circulation aérien n est pas facile (faire le tour dans certains cas).
Sinon bon vol, as tu l’intention de passer IFR ? (cela coute beaucoup plus cher …).
Je n’ai pas encore passé le PPL, seulement un « lâcher », premier vol solo, il me reste encore de nombreuses choses à étudier (navigation, etc.).
L’IFR ne me tente pas particulièrement, en revanche il semble que le vol de nuit soit assez fabuleux.
a vérifier ( pardon je croyais que tu avais le PPL…)
je te conseille de demander à ton instructeur, mais il me semble que tu peux effectuer des vols de nuits (accommpagné ou) en VFR; je ne sais plus si cela est encore authoriser.
Ah la je te conseille d avoir X-plane (linux mac, ) et de faire des vols sous réseaux VATSIM ou IVAO. un groupe vol le vendredi vers 20 30 ou 2100 avec teamspeex,
l avantage c est de maintenir la phrasologie, le controle ATC et certaines heures peuvent etre pris en compte (pour la license pilote )
A TOI DE VOIR, CAR CELA PREND DU TEMPS
(j en sais quelques choses j ai appris le VFR et IFR en simulation )
VASTIM http://www.vatfrance.org/
group CAVOC
http://reseau.xplane.free.fr/initiation/index.html
—> information assez intéressante techniquement….(6 euros c est pas cher)
http://xplanefr.free.fr/inscription/inscription.php
Nangis, aérodrome avec la raffinerie dans l’axe (23) ou l’usine chimique?
Sympa comme expérience, félicitations.
Bravo Christophe pour ce premier vol solo ! Je découvre dans ce billet un nouveau point commun avec toi, en plus de l’intérêt vif pour l’informatique embarquée et les logiciels libres !
J’ai revécu à tes côté mon propre lâché, qui date d’il y a 4 ans (déjà !), presque jour pour jour, j’ai été lâché un 19 septembre ! Je te confirme que ce vol fait parti des vols inoubliables, de ceux dont le souvenir reste présent comme si c’était hier, même plusieurs années après !
Profites bien de tes prochains vols d’ici le PPL, qu’ils soient en solo ou avec ton instructeur !
Souvenirs… enfin, pour ma part, cela date un peu (1987, j’avais 17 ans): L’instructeur l’avait joué assez fine: A peine passé les 10h00 de vol un samedi matin d’hiver, il me dit de m’arrêter en bord de piste voulant fumer une clope et me dis « tu fais un tour tout seul »… Au retour au club, il m’annonce « ca y est t’es lâché », moi surpris « ah, juste un tour ca suffit? »… « bin t’as volé seul oui ou non? »!
En réalité, j’avais été lâché sans même m’en apercevoir :o)
J’avais continué avec le brevet de pilote privé de l’époque (depuis devenu PPL) dans les minimas (le paternel était gentil, mais pas trop argenté, fallait donc tilter vite et participer à faire baiser la moyenne pour l’avoir, plutôt autour des 70/80h00 que des 40) puis, étudiant (naturellement fauché, malgré les heures de cours de sciences donnés) et pas trop loin d’un club de planeur j’avais alors passé (en 7 ou 8h00, ca va assez vite quand on est déjà pilote avion) mon brevet de pilote de planeur et conservé mon brevet avion en assurant les minimas via l’usage du moto-planeur.
En 1995, arrivé sur la région parisienne, les clubs avec 300 membres et devoir programmer mes vols 3 semaines à l’avance m’ont détourné de cette activité dont je n’avais pas entre temps pas pu faire mon métier, ma vue ayant baissé en prépa… je suis donc devenu ingénieur a contre-coeur.
Niveau suite, j’en profite pour conseiller le planeur: C’est plus fin à piloter, tous tiennent les facteurs de charge pour la voltige de base… et ne plus avoir le bruit du moteur dans les oreilles c’est vraiment sympa. Mais les 1500 pieds max entourant assez largement Paris y sont un problème.
En prime, on a des occasions de travailler les atterrissages en campagne. Mais bon, à l’époque, instruit par des bourlingueurs de nos ex colonies africaines et autres ex-chasseurs, même en avion les simili-pannes moteur c’était des remises de gaz au ras des champs
D’ailleurs, on préférait les approches volontairement hautes au quotidien (loin des pentes dignes d’avions de ligne que je peux observer, pas loin de chez moi, a St Cyr Ecole… avec l’A12 peu acceuillant au seuil de piste, passons…) car « il est toujours plus facile de se raccourcir que de se rallonger » ce qui était un entrainement utile.
Procéder ainsi m’a sans doute un jour évité de casser une saloperie d’ATL ,qui avait une sale tendance à givrer même avec le réchauffage… et même si la « glissade », l’aérofrein des machines qui n’en sont pas munies, était déjà jugée trop dangereuse et plus au programme on me l’avait néanmoins enseignée pour cet usage.
Bonne continuation… des fois je me dis que je reprendrais bien, mais bon, 18 ans et un TT devenu PPL qui est a priori pénible niveau équivalences et oblige quasiment à repasser son brevet ca me fait un peu chier. Surtout que j’ai pu constater de ci de là (prises de commandes en accompagnant les enfants pour leur baptème, de temps en temps je trouve qqun avec qui voler en partageant les frais) qu’en fait je n’ai pas trop perdu mes sensations: A croire que comme le vélo ça s’oublie pas. En prime j’ai même pas besoin d’un iPad pour naviguer, un conservateur de cap et une montre me suffisent toujours. A priori, ca devient rare!
Félicitation
j’ai réalisé un vol d’initiation il y a quelques temps qui m’a donné une idée de la masse des paramètres à gérer lorsqu’on se retrouve seul aux commandes.
Flippant et grisant à la fois.
Merci pour ce récit qui donne envie…
Bravo pour ce laché, il restera en memoire toute ta vie. Le mien date d’il y a 15 ans et je me revois encore comme si c’etait hier.
Le vol de nuit est superbe mais il demande des AD equipés. Quand la meteo est correcte on voit les villes a des 10aines de km et il faut prendre garde a la nav car les villes semblent bien plus proches qu’elles ne le sont. Mais les nav au cheminement sont encore plus simples car on voit bien les routes eclairees. Et au pire tu as les VOR.
La suite apres le laché n’est pas tres compliquée quand on a l’esprit cartesien et physique. Du coup ca ne devrait pas te poser de problemes. 🙂
Au plaisir de se croiser sur un terrain (au hasard: LFAI )
Super pour le lacher. Il ne reste plus qu’à découvrir le monde du vol libre (ULM) et sa liberté.
Ahhh ? Je te savais déjà motard, pas pilote… Un vieux rêve…
Bravo (3 ans plus tard… yep, je sais, je rame un peu 😉
Depuis j’ai obtenu ma licence PPL et je passe parfois pas loin de vos locaux… 🙂